mardi 4 novembre 2014

Borderline

La prochaine fois que je voyage avec une amie, j’en choisis une qui n’est pas facialement périmée sur sa carte d’identité.

Après l’Italie du Nord, cap sur le monde croate. Aucune phobie de
la frontière, trop fastoche en Europe. Au loin notre destination, après 2000km elle est douce d’être à portée ! Je stoppe devant le douanier. Trapu, l’œil doux du chien enragé, la casquette vissée sur la tête, un seyant uniforme kaki, il tend la main, et moi, l’œil hagard d’excitation adolescente, demande ce qu’il veut voir. Dans un anglais approximatif et semi-aboyant, what policemen ask you in France ? Surprise du ton et supputant que ce n’était pas mon 06, parce que j’en perdais mon anglais, j’ai demandé : Identitätkarte ? ça a du l’agacer que je passe de l’anglais à l’allemand, alors que ma plaque française. J’ai obtempéré. And ? Les papiers de voiture n’étaient visiblement pas ceux qu’il attendait. Erreur numéro 2. How many persons in the car ?... là j’étais contente parce que j’ai répondu juste. Pendant que j’arborais mon plus beau sourire en serrant les fesses, Sophie est sortie de la voiture, agacée un tantinet par le ton péremptoire de Herr Douanier, a cherché son Identitätkarte dans sa valise et lui a tendu après avoir claqué la porte, signifiant ainsi clairement qu’elle serait moins lèche-bottes que moi. Lui dit : You know it ‘s out of date ? Elle répond que Yes, I know but in France… You’re not in France. But… NO BUT BUT BUT. Park the car. Elle remonte dans la voiture en reclaquant la porte, elle est trop véner. Quel connard ce mec, t’as vu comme il nous parle, je te parie qu’il va nous demander du fric. Souris, Sophie, souris, il nous laissera passer si on reste gentilles.

Il aboie encore. Cars paper. Pas commode. Do you smoke ? Does she smoke ? Je respire et répond calmement, mais je lui mordrais bien l’avant-bras, au gentil monsieur. Nobody’s smoking in the car. You know it’s 500euros for out of date papers ? only 250 if you pay now. J’hallucine, il essaie de nous entuber, le mec. D’abord il veut nous piquer les cigarettes qu’on a pas, puis l’argent qu’on a pas non plus. You pay now or you go to Ljubljana to make other papers. Ok, we go to Ljubljana now, thank you. Elle ne veut pas payer, je suis d’accord avec elle, on fait mine de remonter dans la voiture mais il continue, Do you have some medicament in your car ? Open the luggage. J’ouvre le coffre et déballe ma valise, lui met sous le nez ma trousse de secours qui contient trois boîtes sur ordonnance en lui soutenant que tout est en vente libre. Where do you go ? why ? how many time ? punaise, ma tête tourne quand il m’assaille de questions. Are you going to a man or a woman ? je le regarde atterrée, qu’est-ce que c’est que cette question ? If I call, who will answer ? il nous prend pour des neuneus. La mer noire ? Where exactly do you go ? Give me the adress. On lui donne, il recopie sur un bout de papier pourri qu’il va jeter dès qu’on aura les roues tournées. Regarde ses potes, ils sont morts de rire. Il note encore, consciencieusement. You know you will have to pay if you’re arrested again ? You’re sure you don’t have cigarettes? No cigarettes, Mister, and if you say we’ll have to pay you surely right, you know the law of the country, not me, I trust you. It’s ok for today, you can go. Oh thank you very much, can I ask you what can we do now ? Go to Zagreb? Thank you very much for your help, goodbye.

Il tourne le dos et nous jumpons in the car, sonnées. Il avait juste envie de tester son autorité sur les petites frenchies, celui-là, mais on est pas venues là pour sucer les bites des douaniers, bordel. Alors on se détend un peu, beaucoup, et on rit, on rit, on rit, et malgré cet accueil croate particulièrement hostile, on est trop contentes d’être là. En vacances.



NDLR : Après coup de fil à l’ambassade, le monsieur du bout du fil nous a confirmé que la Croatie accepte les cartes d’identité européennes périmées de 5 ans ; bien tenté, le douanier…

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