Par la fenêtre de la maison, à
travers la vitre embuée, l’avocat
contemple la campagne slovène Il est revenu
du Rwanda dans son enveloppe beurrée, à la barbe des douaniers, m’a suivi un
petit tour en France, Italie, Croatie, et, lui, mon fidèle destrier et moi
hibernons maintenant dans une parenthèse feutrée.
Mon avocat de gauche s'est trouvé un copain. |
A dire vrai, je suis moins
téméraire que j’en ai l’air et l’idée de me retrouver seule dans un pays
inconnu, sans parler la langue et maîtrisant mal l’anglais, sans trop savoir où
j’allais, m’a paniqué un tantinet. J’avais vu et revu le plan avec la
rassurante Sophie, la route était simple entre l’aéroport et mon wwoofing de
destination. Route 108 et pfuit, je serais arrivée. Ce qui devait arriver
arriva : évidemment je pris la mauvaise direction en sortant de
l’aéroport. Engagée sur l’autoroute sans pouvoir m’arrêter pour regarder la
carte, j’étais beaucoup moins inquiète d’être perdue que de voir le voyant
rouge de la pompe à essence me faire de l’œil. Panique à bord. J’ai du rouler
trente kilomètres et dépasser deux stations fermées, jurant, suant, avant d’en
trouver une qui, malheureusement, ne contenait qu’un slovène parlant slovène.
Après force gesticulations et un léger agacement de la part de l’autochtone,
j’ai pu remplir mon réservoir, enfin pas le mien, celui du destrier, et avoir
une vague idée de ma position. Ce qui ne m’a pas empêchée de me reperdre.
Bref, je me suis arrêtée, calmée,
j’ai mangé et réétudié attentivement le plan avant de reprendre la route. La
suite a coulé doux, la route 108 m’est apparue comme le Graal au détour d’un
bras d’autoroute et quelques dizaines de kilomètres plus tard, mis des images
sur l’idée du mois à venir.
Quand j’ai demandé sur facebook
si l’un de mes contacts connaissait un endroit sympa où passer du temps, un
colibri a répondu Slovénie, et paradis… vendu. Sans rien préparer, juste l’accord
de l’hôte, j’ai débarqué. Bon, j’ai d’abord cherché avant de débarquer, qui m’a
permis de rencontrer une slovène absolument charmante. Entre autres m’avoir guidée
vers ma cible, c’est elle qui a écumé les dentistes de la région pour en
trouver un qui accepte bien de soigner la française sans carte européenne de
sécu, elle aussi qui a pris le rendez-vous et m’a accompagnée au boucher
lointain. Lointain car elle a fini par joindre personnellement un ami de ses
parents à une quarantaine de kilomètres qui m’a soignée une semaine plus tard. Une
montagne de muscles et de graisse, le dentiste, un rire sonore qui fait un peu
flipper. Mais il ne m’a pas fait payer, sûrement pour acheter mon silence :
le Père-Noël est slovène et l’année se déguise en dentiste. Chuuuut. Le tout
pour saluer la générosité de ma secouriste de rencontre, la fine blonde aux
yeux éclatants de bleu, au prénom de protection périodique et non, ce n’est pas
Tampax.
Un lien, donc, vers l’auberge
espagnole. Je gardais la surprise de qu’y trouver, et foule de différentes
gens, de particuliers animaux, de la musique, tout le temps, de la nourriture
et du temps, du temps, du temps… du temps pour savourer, du temps pour s’ennuyer,
pour écouter, pour discuter, du temps pour échanger, partager, regarder, du
temps pour penser et se dépenser, du temps pour vivre. Rien à voir avec la
maison dans la prairie où le temps était optimisé, non : dans les collines
slovènes, chaque seconde est précieuse à être vécue.
Dans la pièce chaude du centre
maison, on n’accueille pas les gens. Quand tu arrives chez Urban et Lena, tu es
chez toi déjà, tu as ta place, ils te la donnent quand tu passes le seuil. Déstabilisant.
Un quart d’heure après mon arrivée j’étais déjà d’ici, et personne ne faisait
plus attention à moi qu’à un autre. 5 personnes dans la pièces, Urban sur le
canapé, grattant sa guitare avec force. A ses côtés la française Carola, absorbée
par Kerouac. Igor assis sur le coffre du bois, contre le poêle, tête appuyée au
mur, yeux clos. Ecoute. Et Lena, maîtresse de maison, travaille à l’ordinateur.
Comme un autre monde.
C'est un plaisir de suivre tes péripéties! Bisous!!
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