18 mars, 10h du matin. Le
mois dernier, le monde était différent. J'assiste à ça du Laos,
je ne suis pas chez moi, je n'ai plus de repère. Tout bascule.
Début janvier j'étais
dans le presque cœur du cyclone, à côté de la Chine. Mes proches
s'inquiétaient un peu, de me savoir ici. Le vent a tourné.
Doucement, d'abord, puis s'est accéléré. On a commencé à
entendre qu'il y avait des cas en Italie, en Espagne, en France, rien
d'inquiétant. Puis au Vietnam, alors qu'ils avaient soigné les
derniers cas, une recrudescence due au retour sur le sol d'une jet
setteuse adepte des défilés de mode italiens, et des mesures
drastiques. Fermeture des frontières aux européens. Le vent tourne.
Dans ces pays anciennement colonisés, où restent des traces
profondes du passage des français, on est aujourd'hui pestiférés.
On nous raconte des histoires de français coincés sur un bateau
croisière, au large des côtés cambodgiennes, refusés par tous les
pays limitrophes. On entend des cas de personnes hagardes dans les
rues vietnamiennes, refusées par les hotels, les restaurants, les
bus. On nous raconte des descentes de militaires chopant des
européens effrayés pour les mettre en quarantaine. Ça fait
bizarre, ça, de savoir sa « race » rejetée. Comme un rire grinçant, tu as voir ce que ça fait.
L'heure n'est plus au
tourisme. Chacun fait son choix ; tenter de rentrer, tant bien
que mal, ou rester. Rester.
Je suis partie pour
rompre avec mon quotidien. Pour sortir de ma zone de confort, comme
on dit. J'ai passé 3 mois à découvrir la richesse de la
philosophie permaculture, à m'imprégner des bribes de culture
laotienne auxquelles j'avais accès, à apprendre à vivre avec des
gens fondamentalement différents de moi. Je me suis enrichie,
profondément.
Une parenthèse de
presque 3 semaines de vacances au Vietnam, touriste lambda, nomade,
backpack, légère.
Maintenant une autre
étape du voyage s'amorce. Inconnue. J'entre, comme beaucoup,
dans une période où seront révélées mes propres capacités. Où
la remise en question sera essentielle. La déstabilisation du monde
comme on le connaît doit être accompagnée d'une révolution
intérieure. Redéfinir ses priorités. Il se dit officieusement que
le Laos compte une cinquantaine de cas et que les mesures prises
seront fidèles au régime. Je suis loin de la ville et des foules,
je crois que je suis en sécurité.

En attendant.
Le temps suspend son vol,
les caféiers fleurissent et embaument la nouvelle ère.
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