J'ai de la
chance.
J'ai pu assister,
à l'occasion de l'ouverture d'un restaurant à Luang Prabang, à une
cérémonie Baci. Tout le monde me demande m'est qu'est-ce c'est ?
Mais qu'est-ce que c'est ? Mais qu'est-ce que c'est ?
Raconte-nous Père Castor.
Rapidement :
la majeure partie des lao sont bouddhistes, avec des gros relents
d'animisme. Ils pensent que chacune des 32 parties de notre corps
possède une âme, et que ces coquines ont tendances à s'éparpiller
dans la nature... les cérémonies baci ont lieu à chaque événement
important, et, dirigées par un vieux sage à qui on n'apprend pas à
faire la grimace, ont pour objectif de rassembler dans nos corps nos
âmes fuyantes...
Nous sommes
arrivés au restaurant, invités par le propriétaire phalang. Une
dizaine de personnes sont assises sur un tapis, quelques unes en
costume traditionnel. En son centre : un autel qu'on appelle
makbéng.
Il est constitué de feuilles de bananiers pliées et orné de fleurs
aussi diverses qu'étonnantes, ainsi que de fils de coton blanc, et
surmonté d'une bougie. Le tout trône sur un grand plateau d'osier
sur lequel sont disposées des offrandes, bananes, galettes de riz,
boulettes de riz fourrées à la banane, friandises gluantes fluo au
riz ou à la banane.
On
s'assied, et je me sens gênée, j'ai peur de déranger, je ne sais
pas où me mettre et comment faire, plongée dans cet inconnu... mais
les regards sont accueillants et bienveillants, comme si je n'étais
pas bizarre d'être là. Ils m'invitent à imiter. Nous encerclons le
Makbeng et joignons les mains. Les sages psalmodient de
l’incompréhensible, c'est doux et lancinant, certains yeux sont
fermés... ils rappellent nos âmes. La ville s'efface. Sa clameur
s'éloigne. Le temps suspend son vol, comme dans un écrin moelleux.
Sus. Pen. Du. Mes âmes revenantes.
Puis
les voix se taisent et les sages détachent du Makbeng les bracelets
de coton. En prenant le temps, ils en nouent un à chacun de nos
poignets en récitant des textes rituels, en frottant parfois nos
paumes du bout du doigt, un échange de regards, un geste amical. Une
solennité étonnamment légère, et apaisante...

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