mercredi 15 octobre 2014

Histoire à quatre voix

Au jour du départ… je n’ai pas raconté, ou peu, un peu, la famille Ingalls et il est important. L’observation des spécimen m'a pris au moins autant de temps que tout le reste.

Caroline et Charles ont à eux deux sept décennies, deux fils de un et trois ans, 12 poules, deux coq, 4 poussins (et deux ont été mangés par le chat noir), 8 moutons moutonnes, 4 lapins et un chat (pas noir). Comptez le nombre de pattes.

Beaucoup de temps avec Caro, Junior au dos en permanence, sans soutien-gorge. Caro, pas Junior. C’est important, ça, sans soutien-gorge. Qui oserait ? je n’ai pas demandé pourquoi. Caro est très alternative, elle pense des trucs bizarres et souvent cohérents, fuit tout ce qui touche à la société de consommation, elle a pour objectif l’autosuffisance alimentaire, elle ne veut pas manger de cochonnerie. Ce que j’aime bien, chez elle, c’est qu’elle est complètement incohérente. Par exemple, elle enferme Banjo dans la chambre quand il est pénible alors qu’elle clame haut et fort le sans punition. Et puis je l’ai surprise sur facebook après avoir soupiré qu’elle devait travailler sur l’ordinateur pour une conférence qu’elle organise autour de l’école à la maison. Je l’ai vue se gaver de confiture à la cuillère alors qu’elle ennuie tout le monde avec son « sans sel et sans sucre ajoutés ». Je passe sous silence le pain sans sel et le gâteau d’anniversaire sans sucre, parce que je rejoins complètement Charles sur ce point, m’enfin, y’a quand même pas que la santé dans la vie.

Caro maîtrise, et elle n’appréciait pas toujours que je sois dans ses pattes, même si elle aime bien quand même parce que je fais tous les trucs pénibles comme peler 500 châtaignes ou nettoyer les casseroles qui ont accroché. Comme elle n’aime pas trop que je prenne des initiatives, elle aurait toujours préféré que je fasse autrement, mais ça va aller quand même. Elle a du mal à dire merci, ou à assumer de faire plaisir, alors elle râle. C’est du cinéma, c’est une gentille, au fond.

Elle était instit, dans une vie antérieure, comme d'autres en a beaucoup bavé, maltraitée par sa hiérarchie, s’est tournée vers les pédagogies alternatives. Plus précisément : elle est contre l’école et préfère élever ses fils à la maison, méthode empirique. L'enfant expérimente. Elle est partisane de ne rien imposer à l’enfant, de le respecter « comme un adulte ». Par exemple, quand Banjo tourne autour de la table en tapant sur des casseroles pendant qu’on mange, il faut le respecter. Quand il crache sur son frère, quand il me traite ou qu’il renverse exprès le panier de pommes, il faut le respecter. Il s’exprime ! Banjo, d’ailleurs, qui a toujours 3 ans et des brouettes et parle toujours en codé. Caro pense que c’est normal… je n’ose pas te dire que, sans certitude mais bien probablement, ton gosse a de sérieux problèmes orthophoniques. Banjo a environ 3 consonnes dans son alphabet. Patoto pour « Tracteur Tom » ou « popo » pour « compote » (ce qui peut causer quelque confusion), « Sola » pour « Flora » ou « pou » pour « soupe ». Répète, Banjo : « vache ». « Za ! » Et très sérieusement, elle dit que c’est fou, il arrive jamais à dire vache. Ceci dit le petit Banjo est un enfant très épanoui qui adore courir pieds nus dans la terre, enlever son pantalon et agiter son zizi quand il fait 8° dehors. Banjo connaît tous les légumes du jardin, et les outils de Papa, aussi, même si bon sang, mais non, je t’avais dit le grand niveau, c’est pas un niveau ça. J'aimerais bien revenir voir ce que ça donne, tout ça, dans dix ans.

Junior, son frère, est un enfant charmant, mais strident. Son père dit qu’il a le cri de la buse, ce qui me fait beaucoup rigoler, mais pas trop fort parce que Caro, elle a pas trop le même humour. Il ne crie pas, il s’exprime ! Il faut le res-pec-ter ! On peut le laisser s’exprimer, m’enfin, on peut quand même lui dire d’arrêter de nous hurler dans les oreilles. Caro et Charles ne sont pas toujours d’accord sur l’éducation des enfants.

Charles est super cool. C'est un grand escogriffe, dégingandé, avec des bras de vélux, mais il est super fort, avec sa ceinture serrée au dernier cran et encore elle est trop grande. Il a porté au moins 12000 tonnes de tuiles, et je n’exagère même pas. Il a globe-trotté pendant des années, seul, en stop, avant de rencontrer Caro sur Internet, mariage, maison, bébés et le voilà dans la prairie. Il est vivant, Charles, un peu plus que sa femme. Il aime raconter des blagues sur les mosellans et dire des gros mots. Voyons, Charles, on avait dit pas de gros mot devant les enfants.

Hier était un grand jour, j'ai planté mon avocat. Il avait poussé comme un champignon, près du poêle. Il devient grand.

Hier aussi, on a goûté dehors. Sur une table en bois et sous les châtaignes qui sifflaient à nos oreilles. Pain maison, confiture maison, miel maison, pommes maison, popo maison. Il faisait un temps magistral et ce moment était si doux !... J’ai pris une photo des quatre fantastiques. J’étais bien, ici, avec eux, les courges, les pommes, les tuiles, et le feu qui crépite dans le poêle quand je m’endors.

J'ai eu du mal à partir, cet après-midi. J'ai traîné ma carcasse dans cet endroit si serein en fermant doucement ce petit chapitre. Quelques jours à Paris et le prochain s’ouvre dimanche pour le début d’un périple de dix jours à deux, direction l’Italie du Nord et la Croatie. Youpi !


Avant de quitter, juste une profonde pensée pour Jeannine qui me lit et vit des choses douloureuses en ce moment. Je lui envoie plein de chaudoudoux. Une dédicace à Judith pour la raison qu’elle sait, et un câlin par anticipation à ma nièce qui a encore 4 longs mois au chaud de sa Maman <3

2 commentaires:

  1. Faudra que je te montre ma plante d'avocat (prénommé Ricardo the avocado). Il est en meilleure forme que Berthe, il fait au moins 60 cm de haut et il est vert. Jespere que tes oreilles sont encore vivantes entre les cris des enfants Ingalls.

    RépondreSupprimer
  2. Heureusement d'autres avocats et graines ont germé depuis;-)...

    RépondreSupprimer